La nouvelle procédure de saisie sur salaire applicable le 1er juillet 2025

À compter du 1-7-2025, la procédure de saisie sur rémunération sera déjudiciarisée et facilitée. L’employeur aura un nouvel interlocuteur, le commissaire de justice, qui pourra mettre en oeuvre la procédure de saisie sans autorisation judiciaire préalable. Retour en détail sur cette nouvelle procédure.


 Lorsqu’un salarié a des dettes (ex. : pension alimentaire non versée, impôts non réglés, loyers impayés), soit il peut s’en acquitter volontairement en cédant une partie de sa rémunération à son créancier (cession du salaire), soit le créancier peut mettre en œuvre la procédure de saisie sur salaire, pour obtenir le remboursement de sa créance auprès de l’employeur du débiteur.

Aujourd’hui, et jusqu’au 30-6-2025, la procédure de saisie des rémunérations, régie essentiellement par le Code du travail, ne peut être mise en œuvre par un créancier qu’après avoir obtenu une autorisation judiciaire et après échec d’une tentative préalable de conciliation menée par le juge de l’exécution (C. trav. art. R 3252-12 à R 3252-19). Si la saisie est validée par le juge, l’employeur reçoit une notification de la part du greffe du tribunal judiciaire, lui transmettant un acte de saisie des rémunérations (C. trav. art. R 3252-22 et R 3252-23). Par la suite, il doit verser chaque mois au secrétariat-greffe du tribunal judiciaire une somme correspondant, au maximum, à la part saisissable de la rémunération du salarié (C. trav. art. R 3252-27).

L’article 47 de la loi 2023-1059 du 20-11-2023, complétée par un décret du 12-2-2025, procède à une réforme de la procédure de saisie des rémunérations, en supprimant notamment l’autorisation judiciaire préalable du juge de l’exécution et en confiant la mise en œuvre de la procédure aux commissaires de justice (profession née en 2022 de la fusion des métiers d’huissier de justice et de commissaire-priseur judiciaire). La loi généralise, en outre, la dématérialisation des échanges et prévoit la création d'un registre numérique des saisies. Le juge de l’exécution n’interviendra désormais qu’a posteriori en cas de contestation de la mesure de saisie par le débiteur. Un décret doit encore fixer le nombre maximal d’actes autorisés dans le cadre d’une procédure de saisie des rémunérations. Ces dispositions sont applicables à compter du 1-7-2025.

Déroulement de la nouvelle procédure de saisie des rémunérations

Délivrance d’un commandement de payer au salarié débiteur

Au préalable, le créancier doit être muni d’un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible. La nouvelle procédure de saisie des rémunérations débute par la signification, par un commissaire de justice, d’un commandement de payer au salarié (C. exécution art. L 212-2 modifié) qui lui enjoindra de régler sa dette dans un délai d’un mois, ou à défaut, de trouver un accord avec son créancier sur le montant et les modalités de paiement (C. exécution art. L 212-3 modifié et R 212-1-3 nouveau).

Mentions obligatoires du commandement de payer. Le commandement signifié au salarié doit notamment contenir, à peine de nullité (C. exécution art. R 212-1-3) :

  • la mention du titre exécutoire en vertu duquel les poursuites sont exercées, avec le décompte distinct des sommes réclamées en principal, frais et intérêts échus ainsi que l’indication du taux des intérêts ;
  • le commandement d’avoir à payer dans le délai d’un mois les sommes indiquées ou de parvenir à un accord avec le créancier, avec l’avertissement qu’à défaut il pourra y être contraint par la saisie de ses rémunérations ;
  • l’indication que le salarié peut adresser au commis­saire de justice, par voie postale ou électronique, un courrier l’informant de son acceptation de tenter de parvenir à un accord avec le créancier sur le montant ou les modalités de paiement de la dette et que l’absence de courrier en ce sens équivaut à un refus ;
  • l’indication que le salarié peut, à tout moment, saisir le juge de l’exécution d’une contestation de la mesure.

Les contestations, formées par assignation, sont portées devant le juge de l’exécution du lieu où demeure le débiteur (C. exécution art. R 212-1-7).

Inscription au registre numérique des saisies des rémunérations. Ce commandement de payer doit être inscrit sur le nouveau registre numérique des saisies des rémunérations le jour même ou le premier jour ouvrable suivant sa signification, sous peine de caducité (C. exécution art. R 212-1-2 nouveau).

Le registre numérique des saisies des rémunérations répertoriera toutes les saisies des rémunérations, obligatoirement inscrites par les commissaires de justice qui engageront cette procédure. Placé sous le contrôle de la Chambre nationale des commissaires de justice, ce registre devra permettre :

  • le traitement des informations nécessaires à l’identi­fication des commissaires de justice, des débiteurs, des créanciers et des employeurs tiers saisis ;
  • la conservation et la mise à disposition des infor­mations nécessaires à l’identification du premier créancier, du débiteur et du commissaire de justice répartiteur.

À noter : un décret à paraître doit fixer les conditions de mise en place de ce registre numérique et notamment les conditions de consultation.

Recherche éventuelle d’un accord avec le créancier. Si le débiteur accepte de rechercher un accord avec son créancier, le premier devra en informer le commissaire de justice qui, s’il l'estime nécessaire, entendra le créancier et le débiteur. Au regard des éléments recueillis, il proposera, s’il y a lieu, un accord sur le montant et le paiement de la dette et, si cet accord est accepté, en dressera un procès-verbal (C. exécution art. R 212-1-6 nouveau). Le procès-verbal suspendra alors la procédure de saisie. Si le débiteur ne respecte pas les termes de l’accord, celle-ci pourra être réenclenchée (C. exécution art. L 212-3 nouveau).

 

Cession de rémunérations

La procédure de cession de rémunérations consiste pour le salarié à céder volontairement une partie de son salaire pour rembourser ses dettes (C. trav. art. L 3252-2 ; C. organisation judiciaire art. L 212-1 modifié). Une telle procédure peut notamment intervenir dans le cadre d’un accord trouvé par le salarié avec son créancier pour suspendre la saisie.


Signification à l’employeur d’un procès-verbal de saisie

Après un mois sans réaction de la part du débiteur, le procès-verbal de saisie doit être signifié à l’employeur, accompagné d’un certificat, établi par le commissaire de justice qui a délivré le commandement de payer, attestant que le débiteur n’a pas formé de contestation dans ce délai (C. exécution art. R 212-1-11 nouveau).

Désignation d’un commissaire de justice répartiteur. Avant toute signification d’un acte de saisie, le créancier demande à la Chambre nationale des commissaires de justice de désigner un commissaire de justice répartiteur (C. exécution art. R 212-1-10 nouveau) qui sera chargé de recevoir les paiements de l’employeur, de les reverser au créancier et de répartir les fonds en cas de pluralité de créanciers (C. exécution art. L 212-9). En cas de pluralité d’employeurs, le commissaire de justice répartiteur déterminera les employeurs tiers saisis chargés d’opérer les retenues (C. exécution art. R 212-1-36 nouveau).

À noter : s’il est inscrit sur la liste des commissaires de justice répartiteurs, c’est le mandataire du créancier qui sera désigné (C. exécution art. R. 212-1-10 nouveau).

Le procès-verbal de saisie doit être signifié à l’employeur dans un délai de 3 mois à compter de la délivrance du commandement de payer au salarié ; à défaut, le commandement est caduc (C. exécution art. R 212-6 nouveau).

Contenu du PV de saisie. Le procès-verbal de saisie devra contenir, à peine de nullité (C. exécution art. R 212-1-12 nouveau) :

  • l’indication des nom et domicile du débiteur ;
  • l’indication que l’employeur doit adresser tous les mois au commissaire de justice répartiteur une somme égale à la fraction saisissable du salaire ;
  • le mode de calcul de la fraction saisissable et les modalités de son règlement ;
  • l’injonction de fournir au commissaire de justice, dans les 15 jours au plus tard à compter de la notifi­cation de l’acte de saisie, les renseignements visés ci-dessous ;
  • la reproduction des articles L 212-7 (inscription sur le registre numérique), L 212-8 (obligation de déclaration) et L 212-14 du Code des procédures civiles d'exécution (sanction en cas de non-décla­ration, de fausse déclaration ou de non-paiement) ;
  • l’identité et les coordonnées du commissaire de justice répartiteur qui a été désigné ;
  • le décompte distinct des sommes pour lesquelles la saisie est pratiquée, en principal, frais et intérêts ainsi que l’indication du taux des intérêts.

Tout comme le commandement de payer, le procès-verbal de saisie doit être inscrit sur le registre numérique des saisies des rémunérations le jour de sa signification ou le premier jour ouvrable suivant. Il n’est opposable aux autres créanciers qu’à compter de son inscription. À défaut, le procès-verbal de saisie est caduc (C. exécution art. R 212-1-13 nouveau).

Information du salarié de la saisie. L’acte de saisie doit, à peine de caducité, être dénoncé au salarié dans un délai de 8 jours. Il contient, à peine de nullité, l’indication que, en cas de changement d’employeur, la saisie pourra être poursuivie, sans nouveau commandement de payer préalable, entre les mains du nouvel employeur, ainsi que la désignation de la juridiction devant laquelle les contestations peuvent être portées (C. exécution art. R 212-1-15 nouveau).
 

Intervention d’autres créanciers à la saisie

L'intervention permet à tout créancier muni d'un titre exécutoire de se joindre, un mois après la délivrance d'un commandement de payer constatant une créance liquide et exigible, à une procédure de saisie des rémunérations en cours, afin de participer à la répartition des sommes saisies (C. exécution art. L 212-2, al. 3 modifié).


Obligations d’information de l’employeur

Informations à communiquer au créancier et au commissaire de justice répartiteur

Dès la signification du procès-verbal de saisie, l’employeur devra déclarer au créancier la nature du contrat de travail le liant au salarié (contrat à durée indéterminée ou déterminée), le montant de la rémunération versée au débiteur et les cessions, saisies, saisies administratives à tiers détenteur ou paiement direct de créances d’aliments en cours d’exécution (C. exécution art. L 212-8 nouveau).

Attention, seules doivent être transmises les informa­tions strictement nécessaires à la saisie (C. const. n° 2023-855 DC du 16-11-2023).

Ces mêmes informations sont à fournir au commis­saire de justice répartiteur, au plus tard dans les 15 jours à compter de la notification de l’acte de saisie, en précisant le montant de la rémunération qui doit être versée le mois suivant la signification de l’acte de saisie (C. exécution art. L 212-8 et R 212-1-14 nouveau).

Comme aujourd’hui, en cas de défaut de déclaration ou de déclaration mensongère, sans motif légitime, l’employeur peut être condamné par le juge à une amende civile, sans préjudice d’une condamnation à des dommages-intérêts (C. exécution art. L 212-14). Le décret fixe le montant maximal de l’amende à 10 000 € (C. exécution art. R 212-1-41 nouveau).

Informations en cas de changement de situation du salarié débiteur

L’employeur doit également informer le commissaire de justice répartiteur, dans les 8 jours, de tout événe­ment qui suspend la saisie ou y met fin (C. exécution art. R 212-1-31 nouveau). Il devra également informer le commissaire de la fin du lien de droit qui l’unit au salarié débiteur (licenciement, démission, départ à la retraite…). La procédure de saisie pourra être poursuivie avec le nouvel employeur, par la notification d’un acte de saisie dans un délai d’un an. À défaut de notification, la procédure prendra fin, les fonds seront répartis et la saisie sera radiée du registre numérique des saisies des rémunérations.

Mentions sur la fiche de paie. Les retenues effectuées sur le salaire dans le cadre d'une cession ou d'une saisie doivent obligatoirement être mentionnées sur le bulletin de paie.

Déroulement des opérations de saisie

Versement par l’employeur des sommes saisies au commissaire de justice répartiteur

L’employeur devra verser mensuellement les sommes saisies au commissaire de justice répartiteur (C. exécution art. L 212-12 nouveau). Ces retenues sont toujours limitées par les quotités saisissables prévues dans le Code du travail (C. exécution art. L 212-5).

À noter : le barème des saisies et cessions des rémunérations a été révisé par décret pour l'année 2025 (Décret 2024-1231 du 30-12-2024, JO du 31).

Sanction en cas de non-versement des sommes dues

L’employeur qui ne versera pas les retenues sur salaire au commissaire de justice répartiteur pourra être condamné, par le juge de l’exécution, au paiement des sommes non versées (C. exécution art. L 212-14 et R 212-1-42). Ainsi, si l’employeur n’effectue pas les versements, le commissaire de justice répartiteur en informe les créanciers et le débiteur. Le juge de l’exécution, saisi à la requête du créancier ou de son mandataire, délivre une ordonnance, notifiée à l’employeur, qui devient exécutoire à défaut d’opposition dans les 15 jours de sa notification (C. exécution art. R 212-1-42 nouveau).

En cas de notification d’une demande de paiement direct d’une créance alimentaire, l’employeur verse au créancier d’aliments les sommes qui lui sont dues. Si ces sommes n’excèdent pas la fraction insaisissable de la rémunération, l’employeur en remet le reliquat au débiteur. L’employeur continue de verser au commis­saire de justice répartiteur la fraction saisissable de la rémunération, après imputation, le cas échéant, des sommes versées au créancier d’aliments (C. exécution art. R 212-1-35 nouveau).

À noter : le montant du revenu de solidarité active (RSA), qui correspond à la fraction absolument insaisissable de la rémunération, est porté à 646,52 € depuis le 1-4-2025.

Une procédure dématérialisée

Les envois, remises et notifications des actes de procédure, des formalités, des pièces, avis, avertissements ou convocations, des rapports, des procès-verbaux ainsi que des copies et expéditions des titres exécutoires entre les parties à la procédure (commissaire de justice, salarié, employeur) devront être effectuées par voie électronique. À défaut, les frais ne pourront être imputés au salarié.

Toutefois, lorsque sont concernés le salarié ou l’employeur, ils devront avoir expressément consenti à ce mode de communication. Lorsque la transmission ne peut pas être réalisée par voie électronique pour une cause étrangère à celui qui l’accomplit, elle est effectuée par tout autre moyen permettant de faire la preuve de son accomplissement (C. exécution art. R 212-1-1 nouveau).

Entrée en vigueur de la réforme

La réforme de la saisie des rémunérations s’appliquera à partir du 1-7-2025. La nouvelle procédure sera applicable aux cessions de rémunérations et aux saisies des rémunérations déjà autorisées à cette date, qui seront transmises à un commissaire de justice. À compter de la transmission de la procédure, le créancier disposera, à peine de caducité de la mesure en cours, d'un délai de 3 mois pour confirmer au mandataire ou au commissaire de justice sa volonté de poursuivre la procédure de saisie des rémunérations selon les nouvelles modalités.

À noter : Par dérogation, si une demande incidente ou une contestation est présentée avant le 1-7-2025, elle sera jugée conformément aux dispositions antérieures du Code du travail et du Code des procédures civiles d'exécution.

En conséquence, à compter du 1-7-2025, l’employeur devra cesser tout versement au régisseur installé auprès du greffe du tribunal judiciaire. Les versements opérés après cette date seront rejetés.
 

Une procédure spécifique en cas de saisie administrative à tiers détenteur (SATD)

La SATD est utilisée par l’administration pour obtenir le paiement de dettes fiscales d’un redevable auprès de tiers. Lorsqu’une SATD relative à une créance garantie par le privilège du Trésor public est notifiée à l’employeur, la saisie, qui prime alors sur toute autre saisie en cours, est suspendue jusqu'à l'extinction de l'obligation du redevable, sous réserve des procédures de paiement direct engagées pour le recouvrement des pensions alimentaires (voir ci-dessus) (C. exécution art. R 212-1-33 nouveau, al. 1er). L’employeur doit alors informer le comptable public de la saisie en cours et de l'identité du commissaire de justice répartiteur. Le commissaire de justice répartiteur indique sur le registre numérique des saisies des rémunérations que la procédure est suspendue (C. exécution art. R 212-1-33 nouveau, al. 2). Après extinction de la dette du redevable, le comptable en informe le commissaire de justice répartiteur, qui l'indique sur le registre numérique des saisies des rémunérations (C. exécution art. R 212-1-33 nouveau, al. 3).

Si la SATD notifiée porte sur une créance non garantie par le privilège du Trésor public, l’employeur doit également informer le comptable public de la saisie en cours (C. exécution art. R 212-1-34 nouveau, al. 1er). Cette saisie est assimilée à une intervention (C. exécution art. R 212-1-34 nouveau, al. 2 et 3) qui permet à un tiers de participer à une instance déjà en cours dans le cadre du recouvrement d’une créance. En cas d’extinction, de suspension ou de reprise des effets de la SATD, le comptable public doit en informer le commissaire de justice répartiteur (C. exécution art. R 212-1-34 nouveau, al. 4).


Loi 2023-1059 du 20-11-2023 art. 47, JO du 21 ;

Décret 2025-125 du 12-2-2025, JO du 14

© Lefebvre Dalloz

Rechercher

 

 

 

Demande de contact